Nous avons déjà parlé de Gaël Musquet — qui est radioamateur depuis quelques mois avec l’indicatif F4HXS — notamment dans cette News Radioamateur.Org et dans ce billet ici-même. Et ce dernier billet porte bien son titre car c’est exactement de cela dont nous allons parler ci-dessous.
Mais avant de lire ce billet jusqu’au bout, je vous recommande de visionner la vidéo tout en bas afin de comprendre la suite.
Cette vidéo a été mise à disposition par Sébastien, F4ASS sur sa chaine You Tube à la suite de l’émission “Tous Acteurs du Changement, la chronique des innovations sociales” sur LCI.
Cette vidéo a eu un écho très favorable de la part de nombreux radioamateurs et passionnés de technologies et radiocommunications, notamment sur Twitter où nous sommes un certain nombre à suivre Gaël depuis quelques années et pour certains, qui l’ont motivé à passer son examen radioamateur.
Pourtant, c’est un tweet, un seul, qui m’a poussé à réfléchir et à remettre quelque peu les choses en perspective. Ce tweet, plutôt négatif, est une poussée d’urticaire d’un twittos radioamateur. Je ne le recopie pas ici car cette personne l’a depuis supprimé et le fond de son message n’est pas le plus important. C’est la réaction qui l’est.
Mais il est tout de même intéressant de réfléchir un instant à plusieurs aspects qui me semblent judicieux de ressortir de cette vidéo.
Tout d’abord, le charisme, la facilité d’élocution, le sérieux, mais aussi la décontraction, la passion et l’intérêt, sans affolement ni stress, la fluidité et la clarté du discours, sont des points qui ressortent positivement de cet entretien. Pas de gros mots techniques ou technologiques ou de ‘hype’ pour faire ‘style’ mais des informations très concrètes, complet sans entrer de trop dans le détail. Une communication quasi parfaite !
Sur les seules phrases concernant les radioamateurs, c’est la première fois qu’on peut entendre cette qualité de communication sur ce sujet. Et elle vient d’un jeune qui est seulement radioamateur depuis quelques mois ! Il a certes étudié le sujet et l’argumentation depuis longtemps, et l’utilisation qu’il compte faire de la radio est très réfléchie.
Gaël est présenté comme un “hacker citoyen” et pas comme un radioamateur. On comprend que dans son parcours, la radio est un outil au service du citoyen dans le cadre de moyens de communication dans les situations d’urgence, c’est ce qu’il explique tout au long de la vidéo, avec l’apport des technologies informatiques et communications.
Quand il parle des radioamateurs la première fois dans la vidéo, on les voit d’abord comme des citoyens avec une compétence particulière. Puis il compare le nombre de radioamateurs par habitants pour les USA et pour la France, sans larmoyer sur la différence mais en enchainant sur le fait qu’un radioamateur qui pratique un loisir technique met cette compétence au service de la communauté.
Cela ne vous rappelle rien ? Dans le temps cela s’appelait les Réseaux d’Urgence. Ils étaient bien entendu organisés par le REF. Mais depuis la création des RASEC (radioamateur au service de la sécurité civile), les RU ont cessé (je vous donnerai les références historiques issues de Radio REF sur le sujet en PS de ce billet un peu plus tard). Pourtant, former chaque radioamateur à tenir un QSO multiple, à passer des messages d’urgence, sans obligatoirement faire partie de la sécurité civile, est plutôt une bonne idée. Sachant que le la CMR 2003* sollicitait chaque pays à former les radioamateurs pour les situations d’urgence, le terrain nous est ultra favorable…
Et pourtant, si en France métropolitaine le besoin en radiocommunications d’urgence n’est pas critique — il est d’ailleurs assez bien couvert justement par les RASEC — la France ça se passe aussi en dehors de l’hexagone. Et même si les RASEC y sont aussi présents, l’étendue des territoires, la diversité des phénomènes et des dégâts potentiels sont autant de raisons de compter aussi sur la population. Population devenue radioamateur par le souhait de Gaël vers la fin de la vidéo.
Après un petit rappel de la journaliste à propos de l’implication de Gaël dans différents domaines technologiques, elle lui demande ce qu’on peut lui souhaiter. Gaël répond : “Installer des antennes sur tous les toits de Paris […] passer des licences de radioamateur, devenir radioamateur, devenir opérateur radio ; c’est notre souhait pour que les personnes soient prêtes sur leur territoire […].”
C’est marrant, mais ça me rappelle encore autre chose qui a depuis bien dévissé dans nos activités. Le DX ! Si je ne m’abuse — mais nul doute que le lecteur assidu nous donnera ses informations contradictoires avec sources — nombre d’expéditions d’il y a quelques dizaines d’années, avaient aussi pour objectif de former des opérateurs sur place afin que le pays ait des radioamateurs et que l’on n’ait plus, ou en tous cas beaucoup moins, le besoin de monter des expéditions couteuses pour mettre sur l’air une entité rare. Cela avait donné le radio-club 3V8BB en Tunisie (depuis peu, les licences individuelles sont autorisées en Tunisie) ; 5A1A en Libye, et d’autres dont je n’ai pas les indicatifs en mémoire. Et je n’ai pas l’impression que nous ayons toujours cette fibre de formation puisque nous allons toujours dans des territoires où il y a déjà une présence radioamateur pour faire des expéditions ou des concours !
Il y a tout de même une phrase innocente mais remplie de curiosité de la journaliste qui me parait importante. Elle dit : “[…] avec vos moyens, parce que vous, vous êtes un geek, un hacker, vous détournez ces moyens là au service des populations.”
Si en tant que communauté, sans parler de nos associations, nous continuons à ignorer ces personnes, et compte-tenu que ce qui n’évolue pas meurt, l’avenir du radio-amateurisme tel qu’on le connait est tout tracé…
Comme dirait un Prix Nobel — qui n’a pas inventé le FT8– ‘The Times They Are A-Changin‘.
*Article 25-9 du RR : Les administrations sont invitées à prendre les mesures nécessaires pour autoriser les stations d’amateur à se préparer en vue de répondre aux besoins de communication pour les opérations de secours en cas de catastrophe (CMR 2003)
Certes, en France le besoin de comm d’urgence n’est pas critique. Néanmoins, notre société est tellement dépendante du réseau électrique que, le jour où il y aura un hic (pour l’origine du Hic, on peut dresser une liste bien colorée…), la vision de la comm d’urgence changera sur le billot.
Rien qu’un hiver rigoureux peut, parait-il, faire disjoncter les péninsules électriques que sont notamment la Bretagne et PACA. Pas grave ? Faut attendre de subir pour en être certain.
A mon modeste niveau, j’essaie de faire en sorte que les nouveaux relais V/U voix, digitaux ou APRS soient 100% autonomes. Indispensable.
Suis un brin trop réaliste me dit-on…
J’espère que Gaël nous rendra visite le 26 novembre prochain lors de la 3ème édition d’APRS à l’OUEST à Rennes (ara35.fr).
73. Eric.