C’est pas d’la radio !

Tout a commencé par une remarque personnelle lancée sur Twitter. Elle n’a rien de négatif, de péjoratif, elle n’attaque rien, ni personne, et ne fait que soulever une interrogation personnelle. La vie est aujourd’hui ainsi faite que, quand on se pose des questions, on aime bien les partager sur les réseaux sociaux. Les acquiescements se traduisent par des Like et des ReTweet. Certains se contentent de passer outre une publication qu’ils n’apprécient pas, d’autres réagissent. Twitter est exactement fait pour cela : suivre des informations, les apprécier ou non, ou lancer le débat qui ne sera pas de haute volée tant il est compliqué de s’exprimer précisément, même en 280 signes.
Heureusement, notre communauté, si elle se chamaille souvent sur tel ou tel sujet, ne comporte pas ce que l’on appelle des ‘haters’ ou en français, ‘rageux’, haineux. Le jeu de ces derniers est de dénigrer toutes les opinions contraires à leurs idées, quand ils en ont. Le reste du temps, c’est par pure bêtise, méchanceté et/ou malveillance.
Malheureusement, toujours dans notre communauté, il y a rarement de déclenchement de véritables débats d’idées. Trop souvent, quand vous émettez l’idée que tel ou tel mode ou telle ou telle méthode ‘n’est pas de la radio’, on vous répond souvent à côté, soit par pure mauvaise foi, soit en vous prêtant des intentions qui ne sont pas les vôtres.
J’ai donc décidé d’écrire ce billet pour exprimer plus longuement et précisément ce que j’entends par l’expression ‘C’est pas de la radio’ et voir ce qui m’a été opposé comme arguments et pourquoi ils ne sont pas adaptés.
Ma réflexion est partie du contexte suivant : j’allume mon émetteur-récepteur 144 MHz FM sur la fréquence du relais local. J’ai l’intention de trouver quelqu’un pour me donner des informations sur la partie D-Star. En cherchant des informations récentes sur ce relais de mon département, j’ai vu qu’il est maintenant multi-modes et relié au réseau RRF. Dès l’allumage, j’entends de suite des OM en discussion. L’accent de l’un d’eux me fait prêter l’oreille. J’entends des échanges entre plusieurs stations VE2, puis, au cours de l’échange, des stations du sud de la France répondent et discutent avec les stations VE2.
Je souris en écoutant les discussions, et me viens cette pensée que j’ai ensuite publiée sur Twitter : “Après plusieurs semaines, tu allumes la FM sur ton relais local et tu entends plusieurs stations VE2 en QSO avec des gars du sud de la France !!! Et tu te dis : mais, quand j’ai signé, c’était pas pour de la radio sans fil ? Faisons la même chose en HF et plus besoin d’antennes…
Je n’attendais pas spécialement de réponses mais assez vite, je reçois un certains nombre de Like ce qui sous-entend que ma réflexion intéresse quelques personnes. Puis, viens une première intervention qui m’explique que “ce QSO mensuel est très apprécié et permet à des OMs n’ayant pas les moyens d’installer des antennes HF, de pouvoir converser avec les OMs de l’autre coté de l’atlantique (et du monde). Ca reste de la radio, quoi qu’on en dise. Et sinon, bouton ON/OFF ou QSY 😉 73′
En fait, ma réflexion était complètement idiote de vouloir faire cela en HF. Puisqu’avec un simple talkie vous pouvez contacter toute la planète !
Mais voyons la remarque qui m’est faite suite à ma réflexion.
La première phrase est terrible, non ? Je comprends que le service amateur ce serait transformé en… fournisseur de service tout simplement ! Puisque la technologie le permet — mais toujours pas la règlementation, pour rappel –, interconnectons nos relais analogiques et numériques locaux par le biais d’Internet et offrons la possibilité “à des OMs n’ayant pas les moyens d’installer des antennes HF” de passer outre ce léger problème.
Du coup, j’ai du mal à comprendre la différence entre une discussion sur Skype qui serait retransmise en 144 MHz FM et cette interconnexion prétendument ‘radio’.
La deuxième phrase se veut sans appel et me renvoie à un propos que je n’ai pas encore tenu. “Ca reste de la radio, quoi qu’on en dise.”. Comment peut-on affirmer cela ? La seul point qui est de la radio, c’est le fait que quand j’allume mon appareil 144 MHz FM, je suis sur la fréquence d’un relais local, c’est tout. Le contact que j’entends, ne passe sur un lien radio qu’au début et à la fin. Au milieu, c’est de la VoIP ! On ne peut donc pas qualifier cet échange d’un contact radio ! Nier ce fait est de la pure mauvaise foi. J’en veux pour preuve l’argumentation que l’on m’a servi par la suite, qui est celle-ci :
un utilisateur lambda appuie sur le micro ,et ça “fonctionne” il n’a pas besoin de connaitre les rouages du système IP, dans la radioélectricité on ne maîtrise pas non plus tous les phénomènes de propagation …
J’en reviens à ma première hypothèse : ‘l’utilisateur lambda’ n’est en fait qu’un client qui utilise un service. Exactement comme quand j’utilise mon smartphone ou ma machine à laver le linge : j’appuie sur un bouton et je n’ai pas à me préoccuper de ce qui se passe au milieu.
La seconde partie de la phrase est tout de même chouette. Si je la concatène avec la première, je comprends que : comme la radioélectricité ça fait rien qu’à embêter les utilisateurs car elle demande à avoir des antennes HF et qu’on n’a pas la place, et qu’en plus, ça demande à maitriser la propagation, c’est à dire que l’utilisateur n’est pas certain d’avoir un circuit de propagation entre deux points donnés, et que donc on sait jamais quand on peut discuter avec des potes de l’autre côté de la planète, ben on a qu’à interconnecter des bazars de chez nous avec de l’Internet et voiloù, le tour est joué ! Et si un grincheux vient à nous chercher des poux dans la tête, on a qu’à y dire que que “Ca reste de la radio, quoi qu’on en dise.” Et si il insiste, on n’a qu’à y dire qu’il y a plein de truc à faire en radio et qu’il aille voir ailleurs s’il peut s’occuper de ses poins et ses traits sans nous faire suer, ce que résume la conclusion délicate de notre camarade “Et sinon, bouton ON/OFF ou QSY
Je vous fait grâce du reste des réactions qui sont toutes du même tonneau.
Il se trouve qu’en tant que radioamateur soucieux de cette activité et de son devenir, je me dis que si nous continuons comme cela, à quoi peut bien servir le service amateur s’il se transforme en service aux utilisateurs ? Le radio-amateurisme sera passé de la conquête des ondes par des amateurs pionniers à un service télécom quelconque en passant par sa transformation en CB de luxe en un petit siècle. Avec le laisser-faire et surtout, la volonté des associations.
Si c’est cela que nos camarades aiment pratiquer, c’est à dire se faire un QSO pépère sans se soucier des tracas apportés par la radioélectricité, alors tant mieux pour eux. Mais qu’ils n’appellent pas cela de la radio !
La radio telle que comprise dans la définition du service amateur, est réalisée en point à point et de bout en bout. Elle nécessite de monter des antennes de tailles différentes selon la fréquence utilisée. Si l’on n’a pas la capacité à mettre une antenne adaptée à la fréquence voulue, toutes les solutions existent, de l’antenne raccourcie, très raccourcie, très, très raccourcie, jusqu’à la pratique du trafic en portable ou en radio-club.
Pour la propagation, si on veut l’apprivoiser, il faut en apprendre les ressorts et les aléas. On peut tout aussi bien appeler au hasard de cette propagation et être émerveillé de la distance et de l’endroit exotique ou non qui répondra, aussi bien que de la maitriser au point de diriger son antenne à la date et l’heure prévue, sur la fréquence la plus adaptée pour entendre, toujours émerveillé, la réponse de la station appelée avec plus ou moins de confort audio.
En tous cas, c’est cette radio et aucune autre que j’ai étudié, que j’aime et que je défendrai autant que possible. Je vous laisse avec plaisir les QSO Skype, Zoom, Teams, Discord et autres VoIP mais surtout, n’appelez pas ça de la radio !
Sans aucune animosité de ma part et en espérant éclairer quelques esprits curieux et ouverts.
F8BXI

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Le voyage est la récompense…

7 commentaires à propos de “C’est pas d’la radio !”

  1. vous parlez du D-star c’est la même chose , c’est aussi interconnecté par internet comme tous les modes numériques vous n’êtes pas à une contradiction prêt … donc selon vous si c’est de l’analogique ça ne doit pas exister ? , comme dit tout à l’heure chacun ses gout et ses couleurs … ça existe au même titre que le FT8 ou en bidouillant il n’y a même plus d’opérateur derrière la station… , que la CW , que la phonie, le RRF est un moyen et non une fin à chaque extrémité d’une liaison c’est en radio 10M 6M 2M ou 70cm et au milieu de la VOIP …
    73″ F5NLG

    • Bonjour Jean-Philippe,

      Désolé pour votre commentaire, mais il était dans les spams et je ne l’avais pas vu. À croire que mon blog filtre automatiquement certains thèmes 🙂

      Pour résumé un peu mon sentiment général sur ce sujets, je dirais ceci : je ne suis pas favorable aux interconnexions qui passent par Internet.

      La raison en est très simple : le Service d’Amateur repose sur un principe qui perdure depuis son origine et qui est sa capacité à être mobilisé en cas de problème sur les infrastructures commerciales et/ou et celles des États. À partir du moment où l’un de nos réseaux informatique/numérique s’appuie sur une infrastructure dont nous n’avons pas la maitrise — quelle que soient les redondances techniques informatiques mises en place (fail over, backup, cluster, etc) –, nous ne répondons pas à notre mission principale qui figure dans le RR et qui est rappelé dans les CMR récentes.

      Je connais les argumentations qui vont consister à nous vanter la fiabilité des infrastructures, leur redondance, etc, mais les évènements récents chez OVH montrent que nous sommes tributaires de ces équipements commerciaux.

      Je souhaite aussi qu’aucun évènement ne vienne affirmer le besoin de l’indépendance de nos infrastructures…

      D’autre part, qu’ils soient numériques ou analogiques, même si ce sont des équipements pratiques dans certaines situations, notamment et essentiellement en mobile, ce ne sont que des béquilles. Un contact radioamateur se fait de point à point essentiellement. Si vous voulez me parler de QO-100 ou du trafic par Satellite, il y au moins dans ces cas là, un petit challenge technique, que ce soit dans la mise en œuvre de la station et/ou dans l’établissement des contacts. C’est déjà ça…

      La seule utilisation où je suis favorable à une possibilité d’utiliser Internet en support et/ou passerelle, c’est dans le pilotage d’une station distante. Cela permet au radioamateur citadin d’être actif avec une station située là où il aura la place d’installer ses antennes. Bien entendu, même dans ce cas on peu constater certain abus, mais les tricheurs ne trompent qu’eux-mêmes.

      Concernant plus particulièrement le FT8, ce n’est pas la même chose. C’est pire 🙂 Car c’est tout de même de la radio mais malheureusement, c’est l’utilisation qui en est faite aujourd’hui qui est totalement démente, au point de ne quasiment plus avoir que ça sur 6m ! Il suffirait pourtant que l’association américaine gérante du diplôme DXCC et affiliés ait le courage de l’interdire pour l’obtention de ses papiers peints, pour que les modes de trafic se rééquilibrent.

      Comme vous le dites, et comme je le dis aussi dans mon texte : si cela amuse les personnes d’utiliser ces béquilles, relais, interconnexions, FT8, etc, que grand bien leur fasse !

      Mais qu’ils n’appellent pas cela de la radio !

      73,
      Philippe

  2. En effet, c’est justement l’aspect aléatoire de la propagation, malgré l’apprentissage qu’on acquiert, qui font le charme des contacts ! Si ça marche à coup sûr, ça n’a plus aucun intérêt. Comme ce que l’on construit…

    73 Laurent F6FVY

  3. C’est fort juste tout cela.
    Perso, j’en ai ma claque des journées sur Teams 😉
    Quel bonheur de contacter F6FVY depuis FY5KE sur 10 m même en période de cycle solaire au plus bas.
    Même si ca ne semble pas gagné, c’est au moins une fois par mois voir plus…
    73 Pascal – F5LEN

  4. Bonjour,
    …..Sauf que vous oubliez, de parler de la consommation électrique , que tous ces ‘ systèmes ‘ engendrent….simplement, pour du ‘ confort ‘ radiophonique…Effectivement , pour moi ( pauvre mortel ),ce n’est pas de la radio ! Quand on voit , tous les serveurs , les passerelles VOIP, ….les relais divers et ‘ avariés ‘, qui ‘ moulinent ‘ ,presque à 100%, pour simplement, assurer un ‘ contact ‘ entre , un petit takie walkie, et un ‘ om ‘ , situé à 1000 km, sur son vélo…..! Ca fait peur .!….mais le bonheur des prochaines centrales nucléaires ! ( ….et si ces gars, parlent , d’écologie, dans leur qso…..ça fait encore plus peur ! )
    73, à vous
    14RA44

  5. Radio radio ……. pourquoi pas mais en restant fidele au principe de base :
    1) on fabrique son « poste » ( c’est le mot a la mode)
    2) on fabrique son antenne
    3) on écrit beaucoup de lignes de code
    La c’est du radioamateurisme canal historique

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